Le cheval a inspiré de nombreux auteurs de bande dessinée art qui le représente en général en tant que monture, notamment dans les westerns, les courses hippiques ou les histoires de chevalerie. Certains l’utilisent toutefois dans leurs récits comme personnage principal, second rôle, comparse ou simplement faire valoir.
Le cheval et le western
Parmi les bandes où le cheval sert uniquement de monture, le western se taille la part du lion.
En France, Jonathan Cartland (1974) de Michel Blanc- Dumont et Laurence Harlé débute en 1974 dans le mensuel “Lucky Luke”, puis passe dans “Pilote” en 1977. Amoureux des chevaux, Blanc-Dumont campe avec talent le cheval et son cavalier dans des décors somptueux et avec de superbes mises en couleurs réalisées par son épouse Claudine. Autres westerns français de qualité: Lieutenant Blueberry de Jean Giraud et Jean-Michel Charlier, crée en 1963 dans “Pilote” et qui met en scène un lieutenant de cavalerie en révolte, non loin de la frontière mexicaine ; Alexis Mac Coy de Antonio Hernande Palacios et Jean-Pierre Gourmelin parait dans “Lucky Luke” (1974), puis dans “Tintin’, “Charlie Mensuel” et “Pilote”; Amargo de Victor de la Fuente, édité directement en albums chez Hachette en 1975 et en 1976.
Plus anciennement, Marijac signe, en 1931, Jim Boum, le premier grand western de la bande dessinée française qui parait dans l’hebdomadaire “Cœurs Vaillants”, tandis que l’ancien dragon de Saumur et cavalier émérite, Le Rallie, donne libre cours à son exceptionnelle virtuosité graphique dans la splendide Cavalière du Texas parue dans “Ololé” en 1941. Les mêmes, après- guerre, publient Poncho Libertas dans “Coq Hardi” de 1944 à 1948, précédant le talentueux René Giffey qui captive les lecteurs de Tarzan, puis de l’intrépide avec Buffalo Bill, de 1946 à 1960.
En Belgique, le western est représenté par le dynamique Jerry Spring de Jifé, à partir de 1954 dans “Spirou”: un U.S. Marshall intelligent, pacifique et protecteur des Indiens parcourt l’Ouest américain sur son cheval Ruby et par Comanche de Hermann et Greg dont les flamboyantes images seront dans l’hebdomadaire “Tmtin” à partir de 1982. Enfin, toujours en Belgique, Durango (1981) d’Yves Swolfs propose un western violent, proche des films de Sergio Leone, où un pistolero désabusé sème la terreur parmi les hors-la-loi.
En Suisse, Derib, grand amateur de la race équine puisqu’il publiera même un portfolio intitulé “Les Chevaux” en 1983, dessine les aventures de Yakari, un enfant Sioux chevauchant son fidèle Petit Tonnerre dans l’hebdomadaire suisse “Le Crapaud à Lunettes”, à partir de 1970.
Alors qu’en Espagne, le genre est surtout représenté par Manos Kelly de Antonio Hernande Palacios dans l’hebdomadaire Trinca à partir de 1971, l’Italie n’est pas en reste avec Pecos Bill de Lorenzo de Vita et Guido Martina qui dès 1949 nous offre un justicier parcourant 1’ Ouest américain sur son cheval Turbine (tempête en français) et Rino Albertarelli qui crée en 1937 Kit Carson, un vieux coureur de piste à grosses moustaches blanches, ainsi qu’Aurelio Galleppini et Luigi.
Bonelli, auteurs à partir de 1948 du célèbre Tex Wilier, western insolite à la limite du fantastique et dont l’audience en France sera grande dans les petits formats “Texas Boy”, “Rodéo” et “Spécial Rodéo”. Enfin, n’oublions pas Miki le Ranger du studio italien Esse G. Esse publié dans “Rodéo” (1952) puis dans “Nevada” (1958- 1983) et les récits sur l’histoire de l’Ouest de Serpieri à partir de 1975 et traduits en France (l’Indienne blanche, Dargaud 1985 – Femmes de l’Ouest, Bagheera, 1991).
Aux Etats-Unis où le western est roi, Fred Harmann crée Bronc Peeler en 1934: un jeune cow-boy roux et ambitieux qui fera les beaux jours de l’hebdomadaire “Aventures en France” à partir de 1938. Cette même année, il signe Red Ryder où un autre cow-boy roux exploite un ranch en compagnie d’un jeune indien facétieux Little Beaver (en français: Petit Castor). Cette série remportera un énorme succès dans “Junior”, sous le nom de Cavalier Rouge, puis dans ‘TAventureux” sous le titre Le roi du Far West. Toujours aux Etats-Unis, The Lone Ranger (1939) de Ed Kressy, puis Charles Flanders, met en scène un justicier masqué qui chevauche Silver et hante les plaines de l’Ouest. Hopalong Cassidy de Dan Spiegle traque les voleurs de chevaux à partir de 1942, tandis que Cisco Kid (1951) de José-Luis Salinas parcourt les territoires encore sauvages du Nouveau-Mexique vers 1890.
En Argentine, Randall the Killer (1957) de Arturo del Castillo et Hector Oesterheld, aux scénarios dramatiques, dépeint un cavalier solitaire et ténébreux que les lecteurs français apprécieront dans “Rin Tin Tin”.
Jockeys et champs de course
P’tit Joc (1954) d’André Joy et Jean Ollivier, dans le journal “Vaillant” à partir de 1952, conte l’apprentissage d’un jeune orphelin élevé dans les haras et qui deviendra un célèbre jockey. Graine de Jockey (1973) de Franz et Duval; Captain Tom (1984) et Pur-Sang de Franz se déroulent également sur des hippodromes. Par ailleurs, L’Étalon Noir de Michel Faure et Robert Génin présente dans le “Journal de Mickey” – à partir de 1982 – les aventures d’un farouche pur-sang nommé “Black” et toujours vainqueur sur les champs de courses. Enfin aux États-Unis, Rusty Riley (1948) de Frank Godwin met en scène un jockey incorruptible qui affronte des parieurs malhonnêtes dans des courses truquées.
Chevalerie et cavalcades
Parmi les chevaliers les plus connus dans la bande dessinée réaliste nous avons: Le Chevalier Ardent de Fred Funcken dans “Tintin” en 1952; Le Chevalier Inconnu (1971) dans “Record”; le croisé Thierry de Royaumont dans “Bayard” à partir de 1953. Plus poétique, nous trouvons: Le Chevalier Printemps (1948) de Jean Trubert dans “Pierrot” et, carrément humoristique: Korrigan (1980) de Franz et Vicq qui fourmille de cavaliers et de chevaux dans les positions les plus extravagantes. Enfin, dans Les Compagnons du Crépuscule, Bougeon termine un de ces épisodes avec une représentation détaillée de l’équipement médiéval du “grand cheval”.
Le cheval, héros de bande dessinée
Il apparaît surtout dans les bandes parodiques. Dans “Lucky Luke” (depuis 1946) – où le western est tourné en dérision – le cheval Jolly Jumper n’est pas seulement une monture mais aussi un personnage secondaire aux mimiques de plus en plus critiques à l’égard de son maître et, fort méprisantes envers le chien Ran Tan Plan. Dans Chacal Bill (1975), autre parodie de western publiée dans “Pif Gadget” et signée Maverick (Luc Mazel) et Alpha, le cheval commente l’action et conseille son cavalier. Godaille et Godasse (1978) de Jacques Sandron et Raoul Cauvin est un pastiche des guerres napoléoniennes dans lequel un jeune hussard du nom de Godaille et sa jument Godasse vivent des aventures cocasses. Une autre jument, Câline, dans Câline et Calebasse (1969) de Luc Mazel et Raoul Cauvin, participe à une savoureuse parodie des Trois Mousquetaires d’Alexandre Dumas. Dans Caramba, à partir de 1955, Jimmy Jim de Jean Marcellin, nous raconte les aventures d’un jeune garçon à la tignasse blonde qui chevauche dans un Far West extravagant sur sa monture Biberon. Horace, cheval de l’Ouest de Jean-Claude Poirier paru dans “Pif Gadget” (de 1970 à 1978).
En Grande-Bretagne, de 1930 à 1949, Come on Steve de Roland Davies a pour personnage principal un solide cheval de trait qui cumule bévue sur bévue à la grande joie des lecteurs. À la même époque en Grande-Bretagne sévit George, un petit destrier, héros de gags délirants dans George the Jolly Geegee de Roy Wilson (1938). Enfin, en 1970, le bon gros Penelope de Norman Thelwell subit sans broncher les facéties d’une petite fille dans le Sunday Express.
Au Canada, Neil the Horse (1975) de Aren Saba met en scène un cheval aux grands yeux noirs, plein de vitalité mais un peu niais. Aux États-Unis, Horace Horsecollar des studios Walt Disney est un animal rempli de bon sens et fiancé à Clarabella Cow (Belle Corne). Il divertira en France les jeunes lecteurs du “Journal de Mickey” à partir de 1934, sous le nom de Chrysostome Canasson puis de Horace Dussabot. Toujours aux États-Unis, dans Grangallo et Petitro (1962) des studios Hanna et Barbera, nous avons Grangallo qui est un cheval blanc portant l’étoile du shérif avec pour adjoint la souris Petrito, tandis que la jument Gloria de Reg Bollen dans Animal Crackers (1968) discute philosophie avec un vieux lion.
En Italie, dans Panteleo et Coriolan de Walter Faccini (1939), le cheval Coriolan a pour maître le singe Panteleo, grand amateur de bagarres. Enfin terminons ce bref panorama du cheval dans la bande dessinée en évoquant Trottalemme, le fidèle destrier de Cocco Bill (1957) qui joue un rôle non négligeable dans le western totalement déjanté de Benito Jacovitti.
Pour en savoir plus : les chevaux de fiction