Les objets connectés sont des objets électroniques, directement ou indirectement connectés à internet. Ils permettent de relever des données de nature très variées, les interprètent et apportent ces informations à l’utilisateur. Ces derniers ont donc accès à des connaissances et des possibilités élargies.
Les objets connectés sont désormais courants dans la vie quotidienne. On peut citer en exemple les montres connectées permettant de mesurer la fréquence cardiaque, l’activité, et le tracé GPS des coureurs, ou encore pour rester dans le domaine du sport, les pédales connectées permettant d’analyser les efforts des cyclistes ou les raquettes connectées pour les tennismen. Et si leur utilisation ne fait plus aucun doute pour la plupart des sportifs et ce, depuis plusieurs années, les objets connectés ont fait leur apparition dans les sports équestres beaucoup plus récemment.
L’équitation : un sport, plusieurs domaines, de nombreux objets connectés
L’équitation, ou plutôt les sports équestres, ont cette spécificité de comporter de nombreuses disciplines ainsi que de faire appel à un animal qui implique du coup de nombreux domaines : l’entraînement, la santé, l’alimentation… Chacun de ces grands domaines permet donc l’émergence d’objets connectés dédiés, répondant à une problématique et à un besoin spécifique.
L’entraînement
L’entraînement du cheval est probablement le domaine apportant le plus grand nombre de possibilités pour des objets connectés. En effet, le cheval est un athlète comme les autres, à la différence qu’il n’a que peu de moyens d’exprimer une douleur, une gêne ou une difficulté. Aussi, l’équitation est basée en grande partie sur les sensations, qui sont donc par nature difficilement objectivables. Les objets connectés dédiés à l’entraînement exploitent donc ces aspects-là pour apporter aux cavaliers une meilleure compréhension de leurs sensations, plus d’éléments objectifs sur la gestion de leur entraînement, et une détection précoce des problèmes de leurs chevaux.
Les objets connectés dédiés à l’entraînement du cheval se basent sur deux grands axes du cheval au travail : l’analyse de la locomotion (donc les mouvements du cheval au travail) et l’analyse du système cardio-respiratoire.
La locomotion
L’analyse de la locomotion a commencé dans les années 90 avec l’apparition d’un précurseur des objets connectés : Equimétrix, de la société française Centaure Metrix. Celui-ci mesurait de nombreux paramètres locomoteurs : la cadence (fréquence des foulées), le rebond (déplacement vertical du corps du cheval), l’amplitude (longueur des foulées), la symétrie (ressemblance des demi-foulées entre elles), la régularité (ressemblance des foulées entre elles), la puissance développée dans les trois directions de l’espace, la propulsion… Il proposait également une analyse détaillée des sauts ainsi qu’une comparaison du cheval mesuré aux autres chevaux d’une même race et d’un même niveau. Cet objet a été utilisé de nombreuses années en recherche, et notamment pour la sélection précoce des jeunes chevaux selon certains critères, prouvés comme étant prédicteurs de bons résultats sportifs.
Equimétrix n’a que très peu été utilisé en routine par des cavaliers amateurs (sa complexité d’utilisation et son prix étaient des freins importants), mais l’idée et la performance de l’outil a marqué les esprits.
A partir de 2015, de nombreux autres objets connectés ont vu le jour. Tous répondent à une même question : Comment aider le cavalier à mieux s’entraîner et à progresser plus vite ?
Tous ont également comme point commun de se fixer ou de s’intégrer au matériel existant : la selle, la sangle, les guêtres, le filet, permettant de faciliter leur usage et d’être reliés au smartphone du cavalier ou de l’entraîneur par Bluetooth ou Wifi.
Les indicateurs mesurés sont en général :
- le temps passé à chaque allure
- le temps passé à chaque main
- la cadence
- la régularité de la cadence
- le rebond
- la symétrie
- la vitesse
- l’amplitude
- nombre de sauts
- analyse fine de la qualité des sauts
- analyse de la qualité des enchaînements à l’obstacle
- …
Chaque objet, chaque marque se détache des autres par une approche et un contexte différent. Certains de manière très technique : la selle iJump de CWD est dédiée uniquement au CSO. La sangle Seaver, bien que n’y étant pas dédiée entièrement, présente tout de même une dominante obstacle. D’autres abordent l’usage par la pédagogie et l’accompagnement du cavalier seul. C’est le cas d’Equisense Motion, qui est le seul objet à inclure à date une large bibliothèque d’exercices et de programmes d’entraînement permettant au cavalier de mieux construire son travail.
Le système cardio-respiratoire
Un autre aspect important de l’entraînement du cheval concerne son système cardio-respiratoire. Peu d’objets connectés pour sportifs humains se passent de cette mesure tant elle apporte des informations importantes sur l’état de santé et de forme physique de l’athlète. Pourtant dans les sports équestres, l’utilisation d’un cardio-fréquencemètre était, jusqu’il y a peu, réservé aux seuls cavaliers de concours complet ou d’endurance, et la plupart du temps, seulement aux cavaliers de haut niveau.
Malgré une difficulté plus importante de la mesure de ce paramètre chez le cheval (lié au poil épais et dense ainsi qu’à une peau épaisse, noire et très mobile), de plus en plus d’objets connectés mesurent la fréquence cardiaque du cheval et en déduisent de nombreuses informations : le temps de récupération, la dépense énergétique, le niveau d’athlétisation…
Ce travail initié par la société Polar, non spécialisée dans l’équin mais qui a tout de même proposé une adaptation de ses produits à l’équitation, a été suivi par d’autres sociétés. C’est le cas de la sangle iPulse de CWD, de la sangle Seaver ainsi que du capteur Equisense Motion S.
Ce dernier possède la particularité de mêler la mesure de la fréquence cardiaque et de ses informations dérivées, la mesure de la locomotion, le tracé du travail en extérieur grâce au GPS, et la pédagogie au travers d’une bibliothèque fournie d’exercices, de programmes d’entraînement et de conseils personnalisés. Ces différentes approches et mesures en font donc un objet très complet et utilisable par des cavaliers de différentes disciplines et différents niveaux.
Cavaliers professionnels et entraîneurs
En croisant toutes ces données, ces objets connectés permettent également aux cavaliers de haut niveau ainsi qu’aux entraîneurs d’accéder à des informations riches et contextualisées et d’avoir une interface unique de suivi, de conseil et de planification, comme le fait Equicty. Les cavaliers de haut niveau peuvent ainsi prévoir le travail de leurs chevaux à l’approche d’une compétition et suivre le travail des chevaux restés à l’écuries, mêmes lorsqu’ils sont en déplacement. Quant aux entraîneurs, ils peuvent ainsi conseiller et suivre le travail de leurs élèves en s’appuyant sur des données objectives.
L’alimentation et l’abreuvage
Si l’analyse de la fréquence cardiaque du cheval au travail permet de déduire, entre autres, des informations sur l’athlétisation, elle permet également d’avoir un suivi précis et objectif du niveau de dépense énergétique du cheval et donc d’adapter avec une plus grande précision l’alimentation du cheval.
En cela, les objets connectés sur l’entraînement permettent d’accéder à une alimentation de précision.
Aussi, des objets connectés spécifiques voient le jour dans le domaine de l’alimentation. Citons par exemple les abreuvoirs connectés Blue Intelligence de la société La Buvette, qui permettent de suivre la quantité d’eau ingérée par le cheval, permettant de détecter des anomalies et donc d’anticiper un problème de santé.
La santé
La santé est d’ailleurs un enjeu majeur de réussite sportive ainsi qu’un domaine entier que peuvent desservir les objets connectés.
Certains sont à destination des propriétaires de chevaux. C’est le cas des licols et colliers Nightwatch24 ou du capteur Colicheck qui se fixe sur un membre du cheval. Tous deux permettent la détection précoce des coliques, cette pathologie mortelle si elle n’est pas traitée dès les premiers symptômes.
D’autres sont à destination des professionnels, comme Piavita. Ils facilitent notamment le travail des vétérinaires grâce aux capteurs qui mesurent plusieurs paramètres en même temps (fréquence cardiaque, température, agitation…), et peuvent également suivre tous ces paramètres dans le temps, ce qui permet de monitorer un cheval hospitalisé par exemple, même à distance.
La télémédecine n’est donc pas très loin, même dans le domaine de la médecine vétérinaire.
Le bien-être
D’autres objets connectés, quant à eux, mesurent des paramètres comme la température sous la couverture et l’agitation, non pas à des fins de santé mais plutôt de bien-être et à destination des propriétaires. C’est le cas du capteur Orscana de la société Arionéo.
La liste des objets connectés existants ou sur le point d’exister ne cesse de s’allonger et leurs domaines d’application deviennent de plus en plus variés (sécurité du cavalier, transport des chevaux, …), signes que le marché des sports équestres dans le monde est devenu mature. Tardivement, certes, mais mature quand même.
Si certains regardent ces objets avec un air un peu amusé, les qualifiant pour l’instant de gadgets, il ne reste plus qu’à souhaiter aux sports équestres que l’arrivée de ces gadgets entraîne dans son sillage une amélioration technique significative du sport et des disciplines, et attire vers l’équitation une population encore effrayée par ce sport resté trop “traditionnel”.
Camille Saute
Ingénieure en biomécanique, biomédical, spécialiste en sports et technologies.
Cofondatrice d’Equisense