Les affections parasitaires internes du cheval sont nombreuses et très variées, hétérogènes quant à la nature de l’espèce parasite responsable, d’expression clinique très discrète ou spectaculaire, bénignes ou gravissimes, parfois contagieuses, dangereuses pour l’homme, relevant d’une thérapeutique usuelle et efficace ou au contraire incurables. Les chevaux sont donc souvent victimes de différents vers et les chevaux sont donc de bon clients pour les vermifuges de toutes sortes. Aussi convient-il de les définir et de les classer avant d’étudier plus précisément certaines d’entre elles et d’en dégager quelques règles illustratives.
Les différents types de vers qui menacent les chevaux
Les affections parasitaires internes rassemblent les états pathologiques (“anormaux”) définis par deux critères: les agents pathogènes qui les provoquent et les parties de l’organisme concernées.
Des agents pathogènes qualifiés de parasites, c’est à dire toute espèce vivante, microscopique ou visible à l’œil nu, unicellulaire ou non, vivant ou se multipliant aux dépens d’une espèce-hôte, en l’occurrence le cheval, sont à l’origine des affections parasitaires. Il peut s’agir de vers (helminthes entraînant des helminthoses), d’insectes ou d’acariens (arthropodes responsables respectivement d’entomoses et d’acarioses), de protozoaires (espèces unicellulaires à caractère animal provoquant des protozooses) ou de champignons (responsables de mycoses), espèces et maladies correspondantes étudiées par les parasitologistes. En effet, classiquement, les bactéries et les virus, espèces également capables de vivre aux dépens d’une espèce-hôte, ainsi que les maladies qu’ils provoquent, sont étudiés par les microbiologistes et les infectiologues.
Les affections concernent les viscères et les tissus profonds de l’organisme (s’opposant ainsi aux affections cutanées et des muqueuses superficielles) et regroupent aussi des affections digestives, respiratoires, sanguines, vasculaires et nerveuses.
Soigner son cheval par les vermifuges et autres remèdes contre les vers
Ainsi, la parasitologie n’est qu’une partie de la médecine et relève des mêmes principes et méthodes d’analyse reposant sur la consultation de l’animal, c’est à- dire:
- a récolte des renseignements propres à l’animal – origine, âge, sexe, race, mode de vie, alimentation, exercices, vaccinations, vermifugations, états pathologiques antérieurs, traitements en cours ;
- la récolte des renseignements propres à l’affection – ancienneté des troubles, traitements entrepris et leurs résultats, autres symptômes observés associés, modifications du comportement, de l’appétit ;
- l’examen clinique général de l’animal, appareil par appareil, selon les règles et les étapes médicales reconnues: inspection, palpation-pression, auscultation. Cette démarche doit aboutir à envisager des hypothèses diagnostiques, hypothèses qu’il convient de confirmer (ou d’infirmer) par des examens complémentaires (souvent particuliers en parasitologie) permettant d’énoncer un diagnostic de certitude, d’envisager une thérapeutique spécifique (“antiparasitaire”) et une prophylaxie particulière.
Exemple d’une entomose chez le cheval : les gastérophiloses
Les gastérophiloses sont des affections digestives dues au développement et à la migration dans la cavité buccale, l’estomac puis l’intestin de larves d’insectes appelés Gasterophilus. Elles appartiennent au groupe des myiases (affections dues à des larves d’insectes diptères). Ces parasitoses sont très fréquentes dans nos régions: environ 2/3 des chevaux sont (ou ont été) parasités par ces arthropodes, quels que soient leur âge, leur sexe et leur race. En revanche, seuls les animaux au pâturage sont susceptibles d’être infestés (cf. étude du parasite). En outre, ces myiases peuvent entraîner des troubles de la vidange gastrique, des douleurs abdominales (coliques). Elles illustrent à la fois la forte pré- valence de certaines parasitoses, leurs répercussions cliniques éventuelles et la nécessité, pour établir une thérapeutique et une prophylaxie efficaces, de connaître la morphologie et la biologie des espèces parasites incriminées.
Les gastérophiles adultes sont des mouches, libres dans le milieu extérieur, dépourvues de pièces buccales (ne se nourrissant pas) et pondant leurs œufs en été, sur les poils des chevaux, en différentes régions du corps selon les espèces.
Le cheval s’infeste en ingérant les larves écloses en surface de la peau. Elles migrent dans la cavité buccale, le pharynx puis l’œsophage, se fixent par leurs crochets à la muqueuse gastrique à laquelle elles infligent des lésions ulcératives, puis à l’intestin. C’est au printemps de l’année suivante que les larves de stade 3 sont expulsées dans les crottins et se transforment en pupes desquelles émergeront des adultes. Les stades parasites sont donc uniquement des larves observables chez l’animal, durant la mauvaise saison.
Comment savoir si mon cheval est contaminé par un ver ?
Les chevaux parasités présentent :
- des éléments blanchâtres, de 1 mm de longueur, fixés aux poils. (Ces œufs sont bien visibles, en été, chez les animaux à robe sombre, sur les canons par exemple.)
- des troubles digestifs très variés : le plus souvent discrets (quelques douleurs abdominales ou coliques en hiver, dues à une non-vidange de l’estomac) et disparaissant spontanément au printemps; parfois des coliques plus violentes, dues aux ulcères gastriques et à leurs complications (hémorragies, abcès).
- des larves de stade 3 (2 cm de longueur environ) munies de plusieurs rangées d’épines, tronquées à une extrémité, expulsées dans les crottins au printemps.
Le diagnostic ne repose pratiquement que sur l’observation du parasite. La thérapeutique fait appel à l’utilisation d’insecticides ou d’endectocides administrés par la bouche et prescrits par un vétérinaire. La prophylaxie consisterait à soustraire les animaux à la ponte des mouches adultes, ce qui n’est pas pratiquement réalisable.
Exemple d’une helminthose chez le cheval : la trichonémose
La trichonémose est une helminthose due à l’action pathogène de larves de vers ronds appelés trichonèmes ou cyathostomes. Cette helminthose est très fréquente et largement répandue en zones tempérées, parfois grave cliniquement et de traitement délicat.
Les trichonèmes appartiennent à un groupe de vers ronds appelés strangles. Parmi eux, les trichonèmes, du fait de leur taille réduite (environ 1cm de long), sont appelés vulgairement “petits strangles” par opposition à d’autres parasites de morphologie et de biologie tout à fait différentes appelés “grands strangles” (genre Strongylus).
La trichonémose est une helminthose tout à fait particulière pour plusieurs raisons :
- pratiquement tous les chevaux sont infestés dès qu’ils ont la possibilité d’aller au pâturage et par conséquent d’ingérer des larves de stade 3 infestantes. Ceci signifie que les examens coproscopiques (c’est-à-dire les techniques de laboratoire permettant d’observer des éléments parasitaires, comme des œufs, dans les crottins), sont presque toujours positifs ;
- en revanche, quelques chevaux exprimeront une trichonémose maladie, c’est à dire présenteront des symptômes cliniques dus au pouvoir pathogène des trichonèmes : animaux fortement infestés, chevaux jeunes entrant en contact avec le parasite ;
- les animaux malades sont parasités par les stades pathogènes du parasite que sont les stades larvaires présents dans la muqueuse intestinale. Les examens coproscopiques qui par définition décèlent des éléments disséminés dans les crottins, ne sont donc d’aucun intérêt ;
- la maladie est la conséquence d’une destruction massive de la muqueuse intestinale, elle-même provoquée par la sortie des larves intra-muqueuses vers la lumière intestinale : “débâcle diarrhéique”, matières fécales très liquides teintées de rouge (aspect hémorragique) à cause de la présence de ces larves hématophages expulsées, pertes hydriques importantes, déshydratation, œdèmes des régions déclives (ars, membres), prostration.
La trichonémose permet d’illustrer un phénomène biologique important: l’hypobiose, qui consiste en un arrêt de développement des larves en position intra- muqueuse durant tout l’hiver, c’est à dire plusieurs mois. La poursuite du cycle reprend à la belle saison de sorte que la maladie s’exprime classiquement en fin d’hiver. Tout se passe comme si le parasite “passait la mauvaise saison” chez le cheval et ne reprenait son cycle évolutif que lorsque les conditions extérieures étaient favorables aux mues larvaires (de L[ à L3), dans le pâturage.
Les traitements font appel à des anthelminthiques larvicides (selon des protocoles particuliers) associés à un traitement symptomatique énergique. La protection du cheval est très difficile dans la mesure où les larves trichonèmes persistent dans les pâturages très humides, donc de bonne qualité nutritionnelle.
Les difficultés actuelles résident dans le dilemme auquel sont confrontés les propriétaires de chevaux et les vétérinaires: instaurer des traitements antiparasitaires fréquemment répétés en vue de débarrasser l’animal de ses parasites, au risque de voir apparaître des phénomènes de chimiorésistance (sans oublier le coût de tels programmes) ou bien, ne pas définir de prophylaxie efficace et s’exposer alors à des cas cliniques mortels ou disposer d’animaux inutilisables. C’est le traitement médical des cas observés et la mise au point d’un plan de prophylaxie intégrée et bien conduit au niveau d’un effectif qui permettent, à moindre coût, de gérer les affections parasitaires internes équines.
Pour en savoir plus : les vers et le parasitisme chez le cheval